Depuis quelques jours Amédée a du lait, j’en profite j’y vais souvent et il me donne bien plus que les 6 litres dont j’ai l’habitude. J’ai beaucoup de mal à voir le lait de ces vaches être jeté dans le caniveau. Alors quand il me demande si j’en prendrais plus je dis oui. Il est sympa, il m’offre  les litres en plus. Pour lui aussi c’est dur de balancer le lait de ses vaches et je rentre à la maison avec 9 ou 11 litres.

Il a de deux races différentes de vaches: des Prim’Hostein noires et blanches, immenses, toutes  en os et en bosses, et des Limousines avec des belles robes miel, courtes sur pattes et toute rondes. Les premières donnent le lait et les brunes donnent les veaux. Je ne vois que leurs culs plein de merde quand je rentre dans l’étable et c’est impressionnant ce mélange brut pour les yeux et les narines. Et puis cette chaleur extraordinaire, produite par tous ces corps énormes et paisibles collés les uns aux autres et produisant des tonnes de fumier fumant. Une étable pleine de vaches est un vrai chauffage central!

Quand on était gamins on allait chercher le lait à la ferme d’en face. On partait avec un bidon de 2 litres chacun et c’était toute une aventure. Arrivés là-bas en bas il y avait la grand-mère édentée qui nous souriait. On avait peur d’elle comme on avait peur de tout : les petits chiens hideux qu’ils vendaient et qui faisaient un bruit effroyable, la boue partout, leur gamine sale et sauvage aux yeux perçant qui nous fuyait. On repartait vite.

 Maman le faisait bouillir et le lendemain matin on avait droit à une tartine de pain avec de la crème dessus. Quel délice !

Alors avec le lait d’Amédée je fais d’abord du kéfir et puis du fromage frais et de la feta. Je me suis lancée à faire des camemberts et du brie qui s’affineront pendant des mois. C’est un plaisir ancestral que de faire son fromage. Pour faire une tomme de 2.5kg, il faut 20 litres de lait. Je n’ai pas de casserole de 20 litres ni de grand moule faisselle mais un jour je m’en procurerais et je tenterais. Avec le petit lait je fais de la ricotta. Pour un cheddar de 2 kg il faut aussi 20 litres de lait. Les anglais font de si bons fromages. J’ai les papilles qui picotent à parler de ces bons fromages bien vivants.

Mireille avait quelques chèvres dans le temps et faisait son fromage frais elle aussi mais maintenant les gens préfèrent les fromages de supermarchés. Ils présentent mieux, sont pas chers, et il y a plus de choix. Croit-on. Avec le lait d’Amédée et en hommage à leur passé commun elle fait quelques fromages frais mais comme personne ne le mange chez elle, elle le donne à Amédée ! Elle est déçue par son fromage. Elle me dit goute le, vois ? Je le trouve très bon ton fromage je lui dis. Mais non ! Il est grumeleux. Oui c’est vrai il est grumeleux et alors ? Il est très bon je te dis. Elle fait la moue, pas convaincue.

Eliane n’en fait plus pour Amédée, elle n’en a plus envie. Et pourtant c’est si bon…..

Je vais me lancer à faire du bleu. Dans un bocal j’ai mis une tranche de pain au levain avec du roquefort et j’ai bien fermé. J’attends que le Penicillium roqueforti se développe. Une fois développé je fais sécher mes tranches et les garde dans une boite. J’ai besoin d’une quantité de la grosseur d’un petit pois pour une tournée de 4 litres. Il faut du pain au levain frais….mon pain était-il au levain frais ? J’ai des doutes soudain. Zut. Je l’ai acheté dans ma boutique bio locale….

Faire son fromage est simple : il faut du temps, de la place dans la cuisine et dans le frigo. Tina aime faire de la pâtisserie qui pour moi me semble bien plus difficile que de faire du fromage. Pour mon dernier anniversaire j’ai reçu un petit paquet de Londres : c’était des biscuits délicieux qu’elle avait préparés, présentés et emballés avec soin. On s’est régalé.  Chacun son truc.